Georges Marchais naît le 7 juin 1920 à La Hoguette, village du bocage normand situé au sud du Calvados. Bon élève, il obtient le certificat d'études primaires et le brevet élémentaire mais ne poursuit pas sa scolarité. Il gagne Paris en 1935 pour entrer en apprentissage, puis alterne périodes de chômage et emplois divers. Malgré des déclarations contradictoires, il semble que Georges Marchais reste en marge des grèves du Front populaire et n'est alors peu ou pas politisé. Dans un questionnaire biographique de 1952, il date son adhésion à la Confédération générale du travail (CGT) de 1937 mais cette information n'est pas confirmée. En 1938, il entre à la Société nationale de construction aéronautique du Centre (SNCAC) à Boulogne-Billancourt où il poursuit sa formation professionnelle.
Membre de la classe1940 et employé dans un secteur stratégique de la Défense nationale, Georges Marchais n'est pas mobilisé lorsque débute le second conflit mondial. Mais avec l'avancée allemande, son usine étant déplacée à La Rochelle (Charente-Maritime), il se trouve de nouveau au chômage. À la fin de l'année 1940, il est embauché dans un atelier de l'aérodrome de Villacoublay (Seine-et-Oise, Yvelines) puis, l'année suivante, travaille à Bièvres dans un atelier dépendant de l'entreprise allemande AGO (Aktien-Gesellschaft-Otto). Dans les années 1970 et 1980, les controverses ont été nombreuses sur les conditions du séjour de Georges Marchais en Allemagne, à partir de décembre 1942. Mais rien ne permet d'affirmer catégoriquement le caractère volontaire de son départ pour Augsbourg, en Bavière, où il est affecté à la construction du chasseur-bombardier Focke Wulf 190 au sein de la société Messerschmitt. Les accusations portées contre lui, essentiellement étayées par des sources orales directes ou indirectes, sont surdéterminées par les enjeux politiques, médiatiques ou judiciaires. On ne peut donc manquer de relever dans chacun des témoignages, à commencer par ceux de l'intéressé, de multiples imprécisions ou contradictions. En l'état des connaissances et des sources, aucune conclusion absolue ne peut être tirée.
Les conditions du retour de Georges Marchais en région parisienne et dans l'industrie aéronautique sont également mal connues. Sans doute déjà membre de la CGT, il entre à l'usine Voisin d'Issy-les-Moulineaux au début de l'année 1948 et s'y impose comme un militant particulièrement dynamique et combatif. Tous les documents du Parti communiste français (PCF), y compris son questionnaire biographique, datent son adhésion au parti de 1947, mais celle-ci intervient plus vraisemblablement après son arrivée chez Voisin sur l'encouragement des responsables communistes locaux. Rapidement repéré par les dirigeants de l'Union des syndicats des travailleurs de la métallurgie (USTM) de la Seine, il est délégué du personnel à partir de 1949, secrétaire du syndicat CGT de l'usine l'année suivante. Il est également secrétaire du syndicat des Métaux CGT d'Issy-les-Moulineaux à partir de 1950, permanent de l'USTM de la Seine à partir d'août 1951, membre de son secrétariat deux ans plus tard. Parallèlement, il entre au comité puis au bureau de la section communiste d'Issy-les-Moulineaux. Contrairement à ce qu'indiquent diverses biographies, Georges Marchais n'est pas élu au comité fédéral de la Seine avant sa décentralisation en 1953. À l'issue de celle-ci, en décembre 1953, les membres du secrétariat de l'USTM se répartissent dans les nouvelles fédérations. Un temps proposé pour le comité fédéral de Seine-Sud, Georges Marchais est finalement affecté au comité fédéral de Paris. En mai 1954, lors de la conférence fédérale de Paris, il est l'objet de vives attaques de la part de Raymond Guyot après l'échec d'une grève aux usines Citroën de Javel. Contraint à l'autocritique, il est toutefois réélu au comité puis au bureau fédéral de Paris, puis au secrétariat en novembre 1955, chargé de la propagande. À l'issue de la réunion du comité fédéral du 28 mars 1956, il remplace Madeleine Vincent au poste de premier secrétaire fédéral, responsabilité confirmée lors de la conférence des 7 et 8 juillet. Dix jours plus tard, à l'occasion du 14ème congrès du PCF, il fait son entrée au comité central du PCF comme suppléant. Il en devient titulaire au congrès suivant (1959) et entre au bureau politique en qualité de suppléant. Il intègre le secrétariat en mai 1961(16ème congrès), en charge de l'organisation, succédant à cette tâche à Marcel Servin.
Appelé à des fonctions nationales, Georges Marchais abandonne la direction de la fédération Seine-Sud tout en continuant à siéger au comité fédéral. En tant que secrétaire à l'organisation, il s'associe directement aux évolutions du PCF et de sa politique au cours des années 1960. Au-delà du secteur de l'organisation, il s'affirme sur le plan politique dans le sillage du nouveau secrétaire général Waldeck Rochet et représente le parti français lors de rencontres internationales. Sur le plan national, il accompagne les échanges avec les socialistes, notamment en 1965 lors du soutien à la candidature de François Mitterrand, et l'année suivante lors des négociations avec la Fédération de la gauche démocrate et socialiste (FGDS). En 1968, ses interventions sur le mouvement étudiant signifient le rejet des «gauchistes» par le PCF, tout particulièrement son célèbre article dans l'Humanité du 3 mai 1968 dénonçant «l'anarchiste allemand» Cohn-Bendit.
Profondément ébranlé par l'intervention soviétique en Tchécoslovaquie, Waldeck Rochet est diminué par la maladie à partir de l'été1969. Georges Marchais est désigné secrétaire général adjoint le 11 décembre 1969. Cette nomination apparaît relativement logique, du fait de sa place dans la hiérarchie et au regard des candidats potentiels. Waldeck Rochet lui-même aurait soutenu cette promotion, notamment en raison de sa conviction que Marchais était le plus à même d'aboutir à l'union avec les socialistes, au contraire de Roland Leroy qui affirmait ses réticences. Confirmé au poste de secrétaire général adjoint par le congrès de février 1970 (Nanterre), Georges Marchais prend officiellement le titre de secrétaire général lors du 20ème congrès du PCF (Saint-Ouen, décembre 1972). C'est à cette même période que la polémique publique sur son passé pendant la Seconde Guerre mondiale naît, avec la publication à l'été 1970 dans le Monde d'un texte signé de Charles Tillon, Roger Garaudy, Maurice Kriegel-Valrimont et Jean Pronteau.
Les premières années du secrétariat de Georges Marchais approfondissent la dynamique réformatrice et unitaire de Waldeck Rochet, avec pour point d'orgue la signature du Programme commun de gouvernement avec le Parti socialiste, le 27 juin 1972. Quelques jours plus tard, son rapport devant le comité central, tenu secret jusqu'en 1975, pose toutefois les limites d'une unité dont le profit ne doit pas être abandonné aux seuls socialistes. Sur le plan international, le PCF affiche également une distance critique croissante à l'égard de l'URSS, contribuant activement à la convergence des partis occidentaux dans le mouvement «eurocommuniste», notamment sous l'influence de Jean Kanapa, l'un des plus proches conseillers du secrétaire général. Georges Marchais fait également son entrée à l'Assemblée nationale lors des élections législatives de 1973, comme député de la 1ère circonscription du Val-de-Marne (Arcueil, Cachan, Gentilly, Le Kremlin-Bicêtre, Villejuif). Après le nouveau découpage électoral du département, il est, à partir de 1988, élu dans la 11ème circonscription (Arcueil, Cachan, Villejuif). En dépit des débats qui animent la direction du parti, en raison des positions de Roland Leroy à l'encontre des socialistes et de premiers doutes sur la stratégie d'union après les législatives partielles de septembre 1974, Georges Marchais continue de s'affirmer à travers une démarche rénovatrice qui culmine dans l'abandon de la «dictature du prolétariat» lors du 22ème congrès (Saint-Ouen, février 1976). Cette période lui offre également ses plus virulentes et ses plus célèbres interventions télévisées. Toutefois, la dynamique est brutalement interrompue par la rupture du Programme commun en septembre 1977 puis par le rapprochement progressif avec les Soviétiques, jusqu'au soutien à l'intervention en Afghanistan.
Face aux résultats décevants voire défavorables de la stratégie d'union, face aux pressions du Mouvement communiste international, mais aussi face aux transformations accélérées de la sociologie du parti, la rupture du Programme commun traduit un repli sur l'appareil et les matrices politiques et militantes que Georges Marchais avait si parfaitement incarnées. En 1978, son plaidoyer en faveur des permanents et de l'identité ouvrière et révolutionnaire du PCF expriment parfaitement ces enjeux, tout comme ses critiques contre les intellectuels, fermement repris en main dans différents secteurs. La mise au pas de la fédération de Paris et de ses dirigeants, violemment pris à partie par Marchais, marque à la fois cette stratégie de «ré-identification» et l'éclatement au grand jour de la «crise» du PCF. Au plan national, les candidatures électorales de Georges Marchais marquent dès lors les difficultés croissantes du parti. En 1979, il mène la liste du PCF aux élections européennes et est élu député, sur fond de durcissement des conflits internes. Candidat à l'élection présidentielle de 1981, il obtient un résultat jugé décevant en ne recueillant que 15% des suffrages. En 1984, il est reconduit au Parlement européen mais les élections marquent un nouveau recul du PCF, suivi du retrait des ministres communistes du gouvernement. Dès lors, il ne figure plus au premier plan lors des scrutins nationaux, notamment lors des élections présidentielles de 1988.
Malgré la succession des crises internes et la multiplication des oppositions ou des courants, malgré les difficultés croissantes du parti sur le plan électoral, Georges Marchais conserve la tête du PCF jusqu'en 1994. Lors du 28ème congrès, il cède le poste de secrétaire général à Robert Hue. Il continue toutefois de siéger à l'Assemblée nationale jusqu'à son décès et d'intervenir dans la vie du PCF, exprimant ses craintes devant la «mutation» entamée par son successeur, notamment devant la perspective d'un changement de nom du parti en novembre 1997. Déjà victime de plusieurs infarctus depuis 1975, Georges Marchais est hospitalisé quelques jours plus tard pour insuffisance cardiaque et décède à l'hôpital Lariboisière le 16 novembre 1997. Conformément à sa volonté, ses funérailles rompent avec la solennité des enterrements de dirigeants communistes. La cérémonie se déroule à Champigny-sur-Marne où il est enterré. Dix ans plus tard, une plaque est posée sur la sépulture destinée aux membres de la direction du PCF dans la 97ème division de cimetière du Père-Lachaise signalant ses fonctions et sa tombe à Champigny-sur-Marne.
Source: Pennetier Claude (dir.), Dictionnaire biographique mouvement ouvrier mouvement social. De la Seconde Guerre mondiale à mai 1968, tome 8, Paris, Les éditions de l'atelier, 2012. Notice de Paul Boulland consacrée à Georges Marchais (cote AD 93: 8°6618).