La continuité de cette comptabilité atteste la permanence du lien établi entre la section d'organisation du comité central et les fédérations départementales du PCF, par l'intermédiaire des secrétaires fédéraux à l'organisation, pour contrôler les effectifs des adhérents.
Alain Zoughebi a indiqué que, durant les années 1985-1996, le contact avec les fédérations donnait lieu à l'établissement d'un semainier, alimenté par des points téléphoniques hebdomadaires sur l'état des effectifs départementaux[1]. En fin d'année, sur la base de ces relevés, un état annuel d'organisation était arrêté par la section d'organisation, qui communiquait à chaque fédération les chiffres qui la concernaient, pour vérification. Après validation définitive par la section d'organisation, les chiffres fournissaient la base à partir de laquelle étaient définis les objectifs de la remise des cartes aux adhérents pour l'année suivante.
Ce dossier restait d'un usage interne à la section d'organisation. Selon le témoignage d'Alain Zoughebi, son contenu n'était communiqué qu'au membre du bureau politique responsable de la section d'organisation et au secrétaire général du PCF. Les membres du bureau politique et du secrétariat, eux, étaient informés périodiquement du nombre global d'adhésions nouvelles réalisées et du pourcentage de cartes placées. Les membres du bureau politique assurant le « suivi » politique d'une région disposaient des mêmes chiffres pour les départements composant la région.
Le dossier présenté ici couvre l'année 1937 puis la période 1945 à 1998, avec une interruption générale de 1947 à 1953. Il rassemble une succession de feuillets contenant un tableau par fédération[2], classés dans l'ordre des départements. Chaque ligne du tableau correspond à une année et comporte des colonnes quantifiant respectivement le nombre d'adhérents, le nombre d'adhésions nouvelles, le nombre de sections constituées, le nombre de cellules organisées (détaillées par catégories : cellules d'entreprise, rurales, locales) et enfin le nombre de bureaux de cellule recensés à la fin l'année. Le dossier ne comporte pas de totalisation nationale des données.
Ces chiffres constituent une série homogène et continue sur l'implantation départementale du Parti communiste français durant la deuxième moitié du XXe siècle, qui comble désormais l'absence de source complète et publique sur les effectifs réels (depuis 1945, le nombre de cartes délivrées par la direction nationale aux fédérations était annoncé dans des documents officiels du PCF : documents de congrès ou rapports au comité central). Jusqu'ici, les chercheurs devaient se retourner vers des publications évoquant des sources non publiques :
Dans Le P.C. (Grasset, 1976), Jean Elleinstein présente (pp. 96-97) des chiffres relatifs au nombre de cartes placées au plan national, entre 1961 et 1975, qui selon-lui lui auraient été fournis par la section d'organisation du PCF ;
Dans son Histoire intérieure du parti communiste, t.3 (Fayard, 1986), Philippe Robrieux dresse (pp. 506-508) un tableau des effectifs de quelques grandes fédérations départementales et une courbe de l'évolution des effectifs nationaux du PCF, en s'appuyant sur divers documents : les papiers d'Auguste Lecœur pour la période 1947-1952 et des documents de la section centrale d'organisation pour les années 1960-1970 ;
Dans une étude intitulée « Les effectifs du Parti communiste français » 1920-1984) » (Communisme n° 7, 1985), Philippe Buton procède à un travail de synthèse et de recoupement des sources documentaires disponibles pour proposer (p. 8) une évaluation des effectifs nationaux du PCF durant la période traitée. Il lui donne ultérieurement un prolongement pour la période 1985-1988 (Communisme n° 18-19, 1988).
Dans son travail de synthèse Prendre sa carte (1920-2009). Données nouvelles sur les effectifs du PCF (Fondation Gabriel Péri / Département de la Seine-Saint-Denis, 2010), Roger Martelli a procédé pour la première fois à une analyse systématique de ces documents.
Outre la question propre du niveau et de l'évolution des effectifs nationaux du Parti communiste, les archives de la section d'organisation permettent de travailler sur l'implantation territoriale du PCF. Elles pourront nourrir des études localisées ou, dans une approche plus transversale, le repérage de phénomènes d'homogénéité ou de disparité dans l'évolution de cette implantation.
[1] Il s'agissait bien des cartes placées à des adhérents et non des cartes délivrées à la fédération par la direction nationale.
[2] Il y eut un temps deux fédérations communistes, une fédération « nord » et une fédération « sud », dans certains départements comme le Finistère (1970-1985), la Meurthe et Moselle (1965-1985) ou la Seine et Oise (1963-1966).
États d'organisation communiqués par les fédérations : un tableau par département recensant, année par année, le nombre d'adhérents, d'adhésions nouvelles, de sections, de cellules (dont la répartition par cellules d'entreprises, rurales, locales), de bureaux de cellules constitués, comportant parfois des annotations. 
